Une nouvelle Bataille mondiale du français est engagée !
par Albert SALON
Docteur d'État ès lettres, ancien ambassadeur,
Président de l'association
Avenir de la langue française (ALF).*
Les Nations française, québécoise, wallonne, subissent une «Grande démolition». L’empire est à l’oeuvre contre toutes les communautés francophones dans le monde. Le traité transatlantique de libre échange est aussi un instrument de son hégémonie, notamment culturelle pour la «conquête des esprits» (Y. Eudes). Il ne serait toutefois pas aussi efficace dans la destruction s’il ne s’appuyait dans nos pays sur d’imposantes cohortes de collaborateurs de tous horizons, formatés par des décennies d’une propagande remarquablement efficace.
Pourtant, un constat s’impose : la demande d’apprentissage du français persiste dans les pays développés et en dehors de nos anciennes colonies. Celles-ci, indépendantes depuis des décennies, ont gardé le français, et le développent pour beaucoup. Il progresse en fait et a même un fort potentiel de croissance, surtout en Afrique, à condition que tous les Etats concernés, la France en premier lieu, tiennent à le maintenir et renforcer.
C’est bien ce que nos ennemis extérieurs et intérieurs veulent à tout prix éviter. Pour l’empire anglo-saxon-germain, la France est un objectif hautement stratégique. Le Québec l’est dans une moindre mesure, mais de la même manière. Y détruire le français c’est casser à la fois tout ce que le rival culturel, politique, civilisationnel France représente, et toute la Francophonie mondiale.
Or, dans nos domaines, les «élites» censées conduire nos peuples francophones du Nord sont - derrière des déclarations roboratives - coupables de trois principaux abandons : du français ; du réseau français encore magnifique d’action culturelle au-dehors ; et de la Francophonie organisée-OIF, qui a pourtant son siège à Paris.
À l’école, l’enseignement du français décline dans ses programmes, ses contenus de moins en moins grammaticaux et littéraires, et ses horaires. S’y ajoutent, contre l’excellence : l’effacement de fait du grec et, surtout, du latin essentiel à la maîtrise du français et à la formation de l’esprit, la très sensible réduction des langues modernes autres que l’anglais, ainsi qu’un enseignement des langues d’origine aux enfants d’immigrés qui, mal conçu et ghettoïsant, leur est donné au détriment du français langue de l’intégration sociale, et les maintient en fait dans l’inculture et les ghettos ; c’est en partie intentionnel. Ils en pâtissent.
En France, les langues régionales – riche patrimoine qu’il faut maintenir par une défense sérieuse liée à la langue nationale et officielle - sont hélas instrumentalisées par des potentats qui veulent ressusciter les féodalités, avec l’appui d’institutions de l’UE, de l’Allemagne et de l’Autriche qui misent sur l’ «Europe des régions» pour, hors-Germanie, démanteler les États-nations, leur parangon France au premier chef.
Au Canada français, en Romandie, en Wallonie et à Bruxelles comme en France, la «déconstruction» de la langue française est menée par divers milieux formatés. Ils veulent la remplacer jusque dans l’usage quotidien par l’allemand en Suisse et le flamand en Belgique, et - «croquant l’un et l’autre» - par l’anglais partout.
Dans tous ces pays, les gouvernements eux-mêmes s’en font les complices, sinon les moteurs.
Notre étude* «atteintes des pouvoirs publics au français de 2007 à 2015» l’illustre.
Parmi leurs coups de boutoir, rappelons l’art.2 de la loi Fioraso pour tendre à enseigner en anglais dans le supérieur (cf le dossier) ; citons le colloque uniquement en anglais sur les jeunes pousses, organisé en mai dernier par Mme A. Hidalgo en son Hôtel de Ville (voir ci-dessous). La «trahison des clercs» est chez nous de plus en plus décomplexée, ouverte, implacable, ricanante de mépris envers nos associations et le peuple.
«Déconstruction» aussi de la Francophonie : les États-Uniens ont remplacé la France et chassé le français dans l’ancienne Indochine puis au Ruanda, et cherchent à détacher le Maroc, le Sénégal, au Congo, après avoir essayé en 2003-2004 en Côte d’Ivoire (floraison de drapeaux fournis par le consulat états-unien lors des manifestations contre notre opération Licorne). Nos Français s’y prêtent en négligeant, malgré de beaux discours, la Francophonie et l’OIF en diminuant les crédits publics. Nos gouvernants ont montré leur incapacité à soutenir en Afrique un digne successeur de M. Diouf lors du Sommet de 2014 à Dakar.
Tout cela, goût de la médiocrité aidant, fait une guerre - Claude Hagège la qualifie ainsi - aux Français et autres francophones, une attaque contre leurs racines, la pensée, et l’excellence.
Elle justifie l’appel à une nouvelle Résistance. Pour leur part, nos 32 associations en synergie la mènent sous deux formes : l’appel au droit et l’appel au peuple.
L’appel au droit se traduit surtout par nos recours devant les juridictions administratives contre les offres «Fioraso» de formations diplômantes exclusivement en anglais (cf. dossier).
L’appel au peuple se traduit par notre campagne «Communes pour la langue française» , menée en France avec un succès croissant, pour aboutir à l’équivalent d’un referendum d’initiative populaire, à présenter pour 2017. Nos associations partenaires dans le Jura suisse, au Québec, et en Wallonie, l’étendent chez elles avec les adaptations nécessaires.
*Chers lecteurs qui sentez l’urgence d’une résistance organisée, rejoignez-nous, amenez vos amis à adhérer et militer ! Nous devons lever des légions. Nous invitons les volontaires prêts à exercer des responsabilités dans ALF à être candidats au Conseil d’administration.
Disponible au siège d’ALF, 34 bis, rue de Picpus, 75012 Paris, tel 01 43 40 16 51 - avenirlf@laposte.net
Albert SALON
La tribune du progrès : N°58 Mars 2016